Double imposition

Double imposition

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Nous sommes tous censés savoir que, pour les fonctionnaires internationaux dans le système de l’ONU, la rémunération brute est soumise à un impôt interne dont le barème correspond à la moyenne des impôts nationaux des Etats Siège (Genève – Londres – Montréal – New York – Paris – Rome – Vienne).

L’ONU (159e séance plénière, 18.11.1948, Résolution 239 (III) A, art.7) précise que «les recettes provenant de cet impôt seront utilisées comme crédits accessoires du budget».

En septembre 2004, le Groupe de Travail « ad hoc » sur la fiscalité (Groupe de Travail sur la Fiscalité du Comité du Syndicat du Personnel du BIT et de la Section des Anciens Fonctionnaires du BIT) a noté que, dans certains cas, « il y a donc double imposition : imposition interne des cotisations incluses dans le salaire brut et imposition des pensions qui représentent un salaire différé des fonctionnaires internationaux ».

Comment traiter ce problème ?

La solution de la CFPI est de transformer si nécessaire la pension nette en une pension brute, afin de compenser toute double imposition.

Cette solution est, sans aucun doute, justifiée et bénéfique pour les retraités ; toutefois, elle serait parfaitement corrective s’il était tenu compte de l’imposition interne à la charge des fonctionnaires, mais ce n’est pas le cas.

L’Attestation du BIT « A qui de droit et à toutes fins utiles » (22 janvier 2008) précise que le montant des cotisations à la CCPPNU (2/3 BIT, 1/3 fonctionnaire) est calculé sur la base de la rémunération brute (salaire, émoluments, cotisations CAPS). Cette rémunération brute est soumise à un barême d’impôt interne correspondant à la moyenne des impôts nationaux des Etats Siège, ainsi qu’il est indiqué plus haut.

Cette Attestation – qui met en évidence le risque d’une double imposition pour certains fonctionnaires retraités – justifie la non-imposition d’un tiers de la pension versée.

A ce sujet, il conviendrait de se souvenir du texte de l’article « Les cotisations à la CCPPNU sont déjà imposées par l’OIT » (publié en 2008 par le Groupe de Travail sur la Fiscalité) qui, en fait, affirme déjà que la seule solution correcte, justifiée et parfaitement équitable est l’application de l’Attestation du BIT « A qui de droit et à toutes fins utiles ».

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Hélas, force est de constater que tous les pays n’ont pas la même attitude face à l’Attestation du BIT ou face au concept de double imposition :

> En Espagne, trois Tribunaux Supérieurs de Justice :
. Séville (Andalousie), le 17 janvier 2003,
. Madrid, le 23 décembre 2005 ;
. Barcelone (Catalogne), le 25 mars 2007,
jugent que « si les émoluments ne sont pas sujets à l’impôt, il en sera de même des pensions qui ne sont pas autre chose qu’un revenu différé ».

> Le Canada et les Etats-Unis n’imposent que les deux tiers de la pension et respectent donc l’Attestation du BIT.

> Certains Etats-Membres (France, Japon, Suisse, …) ne tiennent pas compte de l’Attestation du BIT et imposent la totalité de la pension.

> D’autres Etats-Membre n’imposent pas du tout la pension.

Prenons le cas de la France. Le Conciliateur Fiscal de Haute Savoie précise, dans sa lettre du 17 décembre 2009, « L’argument que vous faites valoir, selon lequel les pensions versées devraient être exonérée d’impôt sur le revenu en France à hauteur de la proportion (un tiers) des cotisations correspondantes que vous avez versées antérieurement à la CCPPNU, en période d’activité, et qui n’ont pu être déduites de la base de l’impôt interne prélevé par le BIT, est sans incidence sur cette situation. Le principe de l’imposition en France des pensions perçues a été confirmé par les plus hautes instances judiciaires. Le fait qu’une partie des cotisations qui sont à l’origine de ces pensions ait pu éventuellement être soumise à l’impôt interne du BIT demeure sans incidence sur cette situation. Il relève uniquement de vos relations avec cet organisme. ». On ne peut ici que constater et apprécier le rappel de la situation :
= impôts internes,
= versés au compte « Crédits Accessoires » du budget,
donc :
= le règlement du problème de la double imposition ne relève que de l’organisation concernée.

Toujours en France, le Médiateur du Ministère de l’Economie et des Finances, par lettre du 03.02.2012, mentionne : « Ainsi, certaines organisations, notamment les organisations dites coordonnées comme l’OCDE et le Conseil de l’Europe, remboursent à leur personnel une partie de l’impôt acquitté au titre des cotisations de retraite. Il s’agit de l’ajustement fiscal. Ce choix relève également d’une décision interne à ces organisations. »

L’Attestation du BIT constate la réalité des faits, ce qui est normal étant donné le but dans lequel cette organisation a été créée, mais apparemment les services concernés de cette même organisation ont oublié l’existence du compte « Crédits Accessoires » … Rappelons ici ce que le Tribunal Administratif du BIT avait rappelé dans l’un de ses jugements : « … de plus, le système de contribution du personnel ne vise pas d’imposer les traitements des membres du personnel ; il est un moyen permettant de prévenir ou de supprimer les inégalités et différences qui résulteraient de l’imposition par les Etats Membres ».

Il appartient donc au BIT de respecter – et faire respecter par les autres organisations – l’utilisation de ce compte. Ce qui est demandé ici n’est, en fait, que le respect de la décision prise par l’ONU à sa 159e séance plénière (Résolution 239/III) appliquée par les différentes organisations internationales. Il est incompréhensible qu’aucune organisation appliquant cette correction pour les fonctionnaires en activité ne l’ait appliquée aux retraités.

C’est assez dire qu’une remise en ordre s’impose (comme l’avait déjà déclaré le nouveau Directeur Général du BIT à son arrivée en 2012) :

> Il serait normal que le BIT respecte le droit de ses retraités, et corrige les pertes subies par les retraités résidents dans les pays ne respectant pas son Attestation « A qui de droit et à toutes fins utiles » [1].

> Pour ce faire, le BIT devrait utiliser le compte « Crédits Accessoires » du budget.

Il est évident que le coût de correction des pertes subies par les retraités serait important. Bien que cela ne soit que le résultat d’erreurs commises par les organisations, il faut bien constater que le remboursement total de ces pertes serait impossible à réaliser par les organisations. Mais ceci ne justifie en rien, de la part de ces dernières, l’immobilisme et la persistance de ces erreurs.

Pour leur part, les retraités veulent tenir compte de la réalité : l’Attestation du BIT reconnait enfin les faits à partir des revenus de l’année 2007. Malgré les pertes subies depuis de plus nombreuses années, on peut supposer que les retraités seraient prêts à accepter une correction respectant les dates de cette attestation, à savoir janvier 2008 pour les revenus à partir de 2007.

Pour ce faire, et tenant compte
– d’une part, « que la valeur réelle de la pension versée reste la même, puisque les seuls ajustements ne sont faits que pour tenir compte de l’inflation subie » ;
– d’autre part, que le montant à prendre en compte doit être celui indiqué sur les « Fiches trimestrielles » envoyées à chaque retraité par l’Unité de paiement de la CCPPNU (le montant de l’attestation annuelle remise en fin d’année aux mêmes retraités étant très souvent différent de celui des fiches trimestrielles).

Il suffirait que les retraités présentent à l’organisation les photocopies des fiches trimestrielles de l’année 2014 (valables pour les années 2007 à 2014), afin que l’organisation applique rétroactivement la correction correspondante. A partir des revenus de 2015 (déclaration 2016), les retraités transmettraient chaque année au BIT les photocopies des fiches trimestrielles, et l’organisation appliquerait alors la correction annuelle [2].

Selon le document CCPI-ICS/72/R4 (Doc 3), le taux d’imposition interne est de 23,942% du brut (y compris, évidemment, les cotisations à la caisse des pensions). C’est donc ce taux qui devra être pris en considération pour 1/3 de la pension versée. Le BIT – dans le respect de son Attestation à qui de droit et à toutes fins utiles » – devra effectuer ce remboursement en joignant une attestation «Ajustement fiscal » concernant 1/3 de la pension versée (Doc 7) afin d’éviter toute imposition supplémentaire de la part du pays de résidence.

Pour régler correctement ce problème, il conviendrait de tenir compte du changement apporté à l’échelle des traitements dans le cas où l’impôt interne serait supérieur à celui indiqué par la CFPI-ICS.

Enfin, compte tenu de l’information donnée par le Médiateur du Ministère des Finances de l’Etat Français (Doc.7), une autre solution, respectant la décision actuelle prise par la Caisse des Pensions, serait qu’elle verse le montant net de la pension imposée par le pays de résidence, et verse séparément aux retraités le montant correctif en y joignant une attestation « Ajustement Fiscal » (Doc.7), afin d’éviter toute imposition supplémentaire de la part du pays de résidence.

Cette dernière solution respecterait les droits de la Caisse des Pensions, des retraités et des organisations concernées.

Bien évidemment, tant que cette dernière solution ne serait pas adoptée, l’Attestation du BIT devrait être respectée comme indiqué plus haut dans ce document.

Ci-joint une liste des documents pouvant être utiles. Des copies sont disponibles sur demande au Bureau des anciens.

Clément Roche, membre du Bureau de la Section des anciens, responsable des questions de fiscalité

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[1] Il ne fait aucun doute qu’en France, par exemple,  à la réception de l’Attestation du BIT, de nombreux retraités ont fait leur déclaration (à partir de  la déclaration des revenus de 2007 faite en 2008), soit sur la base des 2/3, soit sur la totalité avec possibilité d’un crédit fiscal sur 1/3 ; ils ont  dû recevoir  ensuite un document du fisc, rejetant leurs déclarations et les pénalisant d’une imposition supplémentaire ; cette imposition supplémentaire devrait donc faire également partie des pertes subies.

[2] L’avis d’impôt du pays de résidence pouvant varier selon qu’il existe, ou non,  des revenus supplémentaires, les fiches trimestrielles transmises aux retraités par la CCPPNU sont bel et bien la seule base de calcul correcte pour cet exercice.

 


3 Comments

Francis Huriet

3 janvier 2017 at 8:19

Je découvre cet article très intéressant. Il y manque par contre une marche à suivre claire pour les retraités actuels pays par pays ou en tous cas un lien vers une page spécifique …

Mokhtar OULDAMAR

28 mars 2017 at 12:40

Bonjour,
Désolé, je n’y comprends que dalle. Peut-on me dire ce que je dois faire pour mon cas, étant retraité depuis 1996 et résidant à Genève depuis cette date et imposé par l’État de Genève depuis cette date sur toute ma pension.
Avec mes remerciements et mes meilleures salutations

Bartolomé de Boer

28 mars 2017 at 10:15

Do you have this article in english?

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