Presque 100 ans d’efforts de l’OIT pour protéger les droits des interprètes Comment faire face au changement technologique – en résumé / Sally Christine Cornwell
Category : Centenaire - Témoignages
Les efforts constants de l’OIT pour protéger le droit des artistes (ceux associés à la musique, au théâtre, aux travaux audiovisuels, etc.) sont peu connus de son histoire. Jusqu’à ce que la technologie pour recueillir ou « fixer » les performances dans les films ou les disques (phonogramme) soit perfectionnée, les interprétations se passaient en direct et les accords sur la rémunération étaient principalement faits entre les interprètes et ceux qui les engageaient.
Avec le développement et l’augmentation de l’utilisation, de la diffusion des enregistrements et des films dans les années 1920, les interprètes devinrent de plus en plus concernés par leur rémunération vu que le nombre croissant de copies de leurs travaux. En outre, ils estimaient avoir le droit de protéger l’intégrité de leurs travaux ; ce serait un droit moral. Alors que les œuvres d’auteurs étaient protégées par des lois internationales datant des années 1880, il n’en existait pas de semblables pour les interprètes. A partir de 1920, l’OIT a reconnu que les artistes étaient des travailleurs qui devaient être rémunérés non seulement pour leur performance initiale mais aussi pour toutes utilisations commerciales ultérieures découlant de leur travail.
Après trente années de consultations entre les gouvernements et les différents détenteurs des droits, la Convention internationale pour la protection des producteurs de phonogrammes et des organismes de radiodiffusion (la Convention de Rome) a été adoptée en 1961. L’OIT, l’UNESCO et l’OMPI s’en sont partagés l’administration. La ratification a été lente mais plus de 90 Etats membres l’ont maintenant ratifiée.
La Convention de Rome a marqué une avancée décisive en reconnaissant que les interprètes avaient un droit de consentement quant à l’utilisation de leurs travaux et pouvaient réclamer une rémunération dans certains cas. Dans le même temps, la Convention a présenté des options afin d’éviter ou de limiter les droits de rémunération. Les syndicats représentants les interprètes n’ont jamais été entièrement satisfaits avec les termes de la Convention mais obtenir une plus grande protection internationale semblait être un objectif improbable.
Depuis 1961, des développements technologiques et des moyens plus sophistiqués (câbles, vidéos, DVD, satellites, technologies digitales) ont tout simplement multiplié les moyens par lesquels les travaux des interprètes pouvaient être copiés (même changés), reproduits, réutilisés et redif-fusés. Il y a plus de 20 ans, l’OMPI a mis à jour et renouvelé ses traités internationaux de copyrights et de phonogrammes mais les efforts pour assu-rer une protection internationale similaire pour les interprètes en audiovisuel n’ont pas abouti.
En 2012, cependant, une conférence de l’OMPI a adopté le Traité de Beijing sur les interprétations audiovisuelles. Cet accord traite principalement des droits sur la propriété intellectuelle des interprètes en audiovisuel (droits éthiques, et droits pour l’autorisation à la reproduction, distribution, location et diffusion au public) pour des travaux qui ont été « fixés » dans des exécutions audiovisuelles. Il y a, néanmoins, des options pour restreindre les droits telles que : remplacement des autorisations avec rémunération et/ou transfert des droits contre des redevances ou rémunération. Le Traité de Beijing avec environ 17 ratifications entrera en vigueur quand 30 Etats l’auront ratifié.
Avec ces développements, quel est le rôle de l’OIT ? Elle n’a pas été très impliquée dans le Traité de Beijing. Le Comité intergouvernemental sur la Convention de Rome le plus récent s’est tenu en 2009. Toute réunion future dépend de « nouveaux » développements, probablement lors de l’entrée en vigueur du Traité de Beijing. Quel est l’avenir de la Convention de Rome une fois que le Traité de Beijing entrera en vigueur ? Certains syndicats de travailleurs ont exprimé des doutes quant à l’efficacité du nouveau traité et souhaitent avoir des clarifications sur les différentes implications.
Après 100 ans de défense des droits des interprètes, est-ce que l’OIT continuera dans cette voie ?
Il est évident que le souci constant de l’OIT pour l’emploi et les conditions de travail des interprètes, dont la plupart ont des emplois atypiques, se maintiendra. Le Forum global de L’OIT sur les relations de l’emploi dans les médias et les secteurs culturels en 2014 fourni une feuille de route. La réunion de l’OIT a été suivie par un manuel syndical : «Soutien aux travailleurs atypiques dans les arts, les médias et les secteurs de divertissements » préparé en 2016 par des membres européens de l’Alliance internationale des arts et des loisirs. La feuille de route et le manuel syndical décrivent tous les aspects critiques de la vie professionnelle des interprètes.
La question demeure : à savoir si l’OIT a un rôle à jouer dans la défense des interprètes et lequel quand leur travaux sont « fixes » et utilisés et réutilisés sous différentes formes.
Ils ont dit…
La connaissance s’acquiert par l’expérience, tout le reste n’est que de l’information.
Albert Einstein